En 1979, l'Américain Jon Kabat-Zinn (né en 1944), docteur en biologie moléculaire du prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), fonde la Clinique de réduction du stress à l'hôpital universitaire du Massachusetts. C'est là qu'il développe son programme MBSR (Mindfulness-Based Stress Reduction : « Réduction du stress par la pleine conscience »). Conçue à l'origine pour diminuer le stress généré par des douleurs extrêmes, cette méthode de méditation a été adoptée depuis par des centaines de centres hospitaliers dans le monde, notamment grâce au succès de son livre, Au cœur de la tourmente, la pleine conscience (1991), présenté ici.
Ce programme de méditation ne vise pas à remonter aux origines profondes du mal-être des patients, mais à modifier leur comportement face à la « tourmente » de la vie. Plus précisément, il s'agit d'un protocole curatif visant à réduire le stress en modifiant la façon dont les patients répondent aux pressions et limitations qu'ils subissent, qu'elles soient physiques ou psychologiques. Il se développe sur huit semaines, à raison de quarante-cinq minutes par jour. Les participants s'engagent pendant cette période à porter toute leur attention sur leurs sensations, émotions et pensées, sans chercher à les changer. À l'aide de différentes techniques de méditation assise (dégustation d'un raisin, attention portée sur la respiration, sur les sensations corporelles, sur l'écoute d'un son…) et parfois de postures corporelles (yoga), l'attitude recherchée est celle d'un observateur neutre, qui ne porterait pas de jugements sur ce qui se présente à lui, d'instant en instant, même si les sensations, émotions ou pensées sont pénibles, voire douloureuses.
L'objectif n'est toutefois pas de s'entraîner à résister à la douleur, mais de la vivre comme elle se présente. Un entraînement à « être » plutôt qu'à « faire », précise le médecin dans l'extrait ci-contre, convaincu que ce programme peut aider à vivre un sentiment de plénitude, qu'il associe à une réelle « guérison » – non pas des maladies comme telles, ni de la « tourmente » qu'il juge inhérente à la vie, mais du sentiment de détresse qu'elles génèrent.
Est-ce vraiment nouveau ? Sur le fond, pas du tout, reconnaît volontiers Kabat-Zinn. Bien avant de créer son programme, lui-même fréquentait des cours de yoga et recevait les leçons de maîtres bouddhistes très influents aux États-Unis dans les années 1970, dont le moine zen Thich Nhat Hanh. Une influence qui se retrouve dans l'usage même du mot mindfulness, traduction d'un terme bouddhique (sati, en langue pali) que Kabat-Zinn a popularisée. Mais le créateur de la MBSR a dépouillé son programme de toutes références religieuses afin qu'il soit accessible à tous, autant pour affronter la douleur (cancer, rhumatismes aigus, etc.) que les troubles psychologiques.
Article du journal Le point, 16 juin 2017